9. Le traitement aux gonadotrophines peut être utilisé pour déclencher l’ovulation chez les femmes souffrant d’infertilité due à un trouble ovulatoire grave, ou comme traitement empirique chez celles qui n’ont pas d’autre choix que la FIV. Le traitement aux gonadotrophines ne doit être utilisé que lorsqu’il existe des installations d’échographie pour identifier le nombre de follicules en cours de maturation afin d’améliorer l’efficacité et d’éviter une stimulation ovarienne excessive.
(a) Induction de l’ovulation par gonadotrophines :
L’aménorrhée ou l’oligoménorrhée indiquent généralement une anovulation ou une oligoovulation, respectivement. Des valeurs élevées de FSH impliquent une insuffisance ovarienne ou un trouble de l’ovulation de type III OMS (Organisation mondiale de la Santé) qui ne peut être traité par des gonadotrophines. Toutefois, si les valeurs de la FSH sont faibles à normales, un traitement aux gonadotrophines peut être indiqué. L’anovulation peut être due à une aménorrhée hypothalamique (type I OMS), auquel cas les taux de FSH sont faibles à faibles-normaux, mais le trouble sous-jacent le plus courant est le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), qui est inclus dans le groupe type II OMS et est généralement initialement traité avec du citrate de clomifène. (ASRM, 2008)
Les indications d’utilisation des gonadotrophines pour l’induction de l’ovulation dans le groupe type II OMS avec oligo-anovulation sont (1) lorsque le traitement au citrate de clomifène n’a pas réussi à stimuler l’ovulation après 3 cycles et (2) lorsque l’ovulation se produit avec le traitement au citrate de clomifène, mais qu’il n’y a pas de grossesse après 3 à 6 cycles.
Dans les protocoles cliniques chez les femmes qui n’ont pas de règles, le traitement par gonadotrophine est généralement commencé après des règles induites par un progestatif, à une dose assez faible de 37,5 à 75 unités internationales (UI) de FSH par jour, en utilisant la préparation approuvée la moins coûteuse disponible. Lorsque le contrôle échographique montre un ou deux follicules matures d’un diamètre d’environ 16 à 18 mm, la libération de l’ovocyte peut être induite avec de la gonadotrophine chorionique humaine (hCG), de l’hormone lutéinisante recombinante (rLH) ou un agoniste de l’hormone de libération de la gonadotrophine (GnRH). Avec plus de deux follicules matures, le risque de grossesse multiple est excessif. L’ovulation se produit généralement 24 à 48 heures après l’injection de la hCG, et il convient de conseiller des rapports sexuels au moment opportun (ASRM,2008b ; ASRM, 2008c).
Il n’existe pas d’essais sur l’efficacité du traitement aux gonadotrophines pour l’induction de l’ovulation car, avec des taux de grossesse non traités d’environ 2 % (Brown, 2009), il est peu probable que les taux de grossesse associés à un traitement supérieur à 10 % soient biaisés. Dans 13 études portant sur 1269 cycles et 881 femmes infertiles anovulatoires ayant reçu un traitement aux gonadotrophines, le taux de grossesse était de 15 % par cycle et de 41 % par patiente (Mulders, 2003). Les taux de grossesse sont plus élevés chez les femmes atteintes d’aménorrhée hypothalamique (25 % par cycle) que chez celles atteintes du SOPK (8 % par cycle) (Fluker, 1994).
La grossesse multiple et le syndrome d’hyperstimulation ovarienne (SHO) sont les effets indésirables les plus fréquents après le traitement d’induction de l’ovulation. La prévention des naissances multiples dépend de l’annulation du cycle s’il y a plus de deux follicules matures ; la fréquence et la gravité des naissances multiples peuvent être réduites au minimum en utilisant des doses plus faibles de hCG ou en remplaçant la hCG par la rLH ou un agoniste de la GnRH (ASRM, 2008i ; ASRM, 2012b). Les grossesses multiples peuvent être particulièrement risquées dans les environnements à faibles ressources où l’accès aux soins maternels et prénataux est souvent très limité.
Résumé provisoire
- Chez les femmes souffrant d’infertilité due à l’oligo-anovulation et pour lesquelles le traitement au citrate de clomifène ou à la metformine n’a pas donné de résultats, des données tangibles montrent que le traitement aux gonadotrophines est efficace.
- Il est prouvé que le taux de grossesse est plus élevé dans le cas de l’aménorrhée hypothalamique que dans celui du syndrome des ovaires polykystiques.
- Les protocoles doivent tenter de minimiser le risque de grossesse multiple et de syndrome d’hyperstimulation ovarienne.
- (b) Stimulation ovarienne par gonadotrophine avec IIU: la stimulation ovarienne avec IIU peut être utilisée pour l’oligo-anovulation après l’échec du traitement au clomifène et comme traitement empirique (FSH/IIU) lorsque la FIV n’est pas disponible.
Lorsque la FIV n’est pas accessible, la stimulation ovarienne par gonadotrophine suivie d’une IIU est utilisée comme traitement empirique. Cette application concerne généralement les couples présentant une infertilité inexpliquée ayant, sans succès, essayé des traitements plus légers ou d’autres diagnostics après avoir, sans succès, essayé un traitement standard. L’objectif étant d’augmenter le nombre de follicules matures, la probabilité de grossesse s’accompagne d’un risque supplémentaire de grossesse multiple.
Deux essais fournissent des preuves apparemment contradictoires sur l’efficacité de la stimulation ovarienne par gonadotrophine avec IIU. Le traitement a été efficace chez les couples présentant une infertilité prolongée (Guzick, 1999), mais pas chez les couples dont le pronostic était bon et dont la durée de l’infertilité était inférieure à trois ans (Steures, 2006). Bien qu’il y ait eu des différences dans le traitement du groupe de contrôle et les doses de gonadotrophines, la différence de durée de l’infertilité suffit à expliquer l’apparente contradiction (Tableau 2).
Deux ECR sur le traitement à la gonadotrophine et avec IIU
Auteurs | Guzick et al., 1999 | Steures et al., 2006 |
---|---|---|
Nombre de couples | 231 | 127 |
Durée de l’infertilité (années) | 3.5 | 2.0 |
Taux de grossesse (%) | ||
FSH/IIU | 33 | 23 |
Groupe de contrôle | 10 | 27 |
L’essai Guzick (1999), impliquait 4 cycles de stimulation ovarienne par gonadotrophine avec IIU dans le groupe de traitement et quatre cycles d’insémination intra-cervicale (IIC) dans le groupe de contrôle. L’essai Steures (2006) portait sur 6 cycles stimulation ovarienne par gonadotrophine avec IIU ou six mois d’expectative. L’objectif du traitement aux gonadotrophines était différent dans les essais : dans l’essai Guzick (1999), la dose était de 150 UI d’hormone folliculo-stimulante par jour jusqu’à ce qu’au moins deux follicules atteignent 18 mm ; dans l’essai Steures (2006), la dose était de 75 UI par jour jusqu’à ce qu’au moins un follicule atteigne 16 mm.
Le régime de gonadotrophines de l’essai Steures (2006) a permis d’obtenir un taux de grossesse de 23 % par couple, contre 33 % avec le régime plus agressif utilisé dans l’essai Guzick (1999). Le régime agressif de gonadotrophine a cependant provoqué trois naissances de quadruplés, quatre naissances de triplés et 18 naissances de jumeaux sur les 80 grossesses pendant les cycles de gonadotrophine/IIC ou IIU, soit un taux de naissances multiples de 32 %. Il n’y a eu que quatre naissances multiples (deux triplés et deux jumeaux) dans l’essai Steures (2006). Les taux de grossesse unique calculés pendant les essais étaient de 23 % et 20 % pour les régimes de gonadotrophines agressifs et non agressifs, respectivement.
La principale différence entre les essais, cependant, se situe dans le taux de grossesse dans les groupes de contrôle : 10 % dans l’essai Guzick (1999) contre 27 % dans l’essai Steures (2006). Cela est associé à une durée plus longue de l’infertilité (3,5 contre 2,0 ans) dans le premier essai. Dans un scénario hypothétique, le taux de grossesse avec le régime de Guzick ne serait pas significativement meilleur que celui des régimes de contrôle de Steures et le taux de grossesse avec le régime de Steures serait significativement meilleur que celui des régimes de contrôle de Guzick.
En pratique, il est essentiel de tenir compte d’ l’environnement clinique : les patients, le protocole et les installations de surveillance. En ce qui concerne l’environnement clinique, étant donné que les risques de grossesse multiple ont des conséquences encore plus graves dans des milieux aux ressources limitées, des régimes non agressifs sont essentiels. En ce qui concerne les patients, à moins que la durée de l’infertilité ne dépasse trois ans, la gestion de l’expectative est aussi efficace que le traitement par gonadotrophine ou par voie intra-utérine. En ce qui concerne les installations, un contrôle minutieux par échographie est nécessaire pour réduire au minimum les naissances multiples. Il est toutefois important d’informer les patientes que les taux de grossesse par cycle de traitement modéré à la gonadotrophine avec IIU sont dans la même fourchette que ceux du traitement à la CC avec IIU.
Le traitement optimal dépend souvent de la situation socio-économique, de l’environnement de soins cliniques, de l’expertise des prestataires et des caractéristiques des patientes. Un essai de gestion (FASST) a impliqué 503 couples présentant une infertilité inexpliquée et qui ont été répartis au hasard entre trois cycles de CC/IIU, puis jusqu’à six cycles de FIV ou trois cycles de CC/IIU, puis trois cycles de gonadotrophine/IIU avant les cycles de FIV. Le groupe qui n’a pas reçu de gonadotrophine/IIU a enregistré plus de grossesses plus tôt et à moindre coût que le groupe qui a été randomisé pour les trois étapes (Reindollar, 2010). Ainsi, lorsque la FIV est disponible, le traitement aux gonadotrophines/IIU n’apporte aucune valeur ajoutée.
Dans un autre essai réalisé sur des patients présentant une infertilité masculine inexpliquée ou légère, la FIV avec transfert électif d’un seul embryon a été comparée à la FIV dans un cycle naturel modifié et à l’insémination intra-utérine avec hyperstimulation ovarienne contrôlée. Les taux de naissances vivantes uniques en bonne santé dans les 12 mois étaient similaires (43 % à 52 %) et les taux de grossesses multiples étaient faibles avec les trois traitements (Bensdorp, 2015).
Résumé provisoire
- De preuves solides indiquent que la stimulation ovarienne par gonadotrophine avec insémination intra-utérine n’est pas un traitement empirique efficace si la durée de l’infertilité est inférieure à trois ans.
- Des preuves solides montrent que, si la stimulation ovarienne par gonadotrophine avec insémination intra-utérine constitue un traitement empirique efficace chez les patients présentant une infertilité de trois ans ou plus, son bénéfice est faible.
- Le traitement par stimulation ovarienne par gonadotrophine avec insémination intra-utérine peut être associé à une probabilité inacceptable de grossesse multiple. Des protocoles, qui minimisent ce risque, doivent être utilisés.
- Des preuves solides montrent que lorsqu’un traitement de fécondation in vitro est disponible, commencer par suivre un traitement de stimulation ovarienne par gonadotrophine avec insémination intra-utérine n'apporte aucune valeur ajoutée.
- La meilleure approche de traitement dépend de nombreux facteurs cliniques et non cliniques.
3. Chirurgie de l’infertilité : la chirurgie tubaire et/ou la chirurgie des fibromes, des adhérences et de l’endométriose sont parfois indiquées. Chez des patientes rigoureusement sélectionnées, le drilling ovarien par laparoscopie peut être utilisé pour traiter le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK). La chirurgie hystéroscopique peut être indiquée pour les polypes, les myomes, les adhérences intra-utérines, l’obstruction coronaire et les anomalies utérines telles que la cloison utérine. Il est important de traiter les affections endocriniennes coexistantes et les autres problèmes d’infertilité féminine et masculine.
La valeur de la chirurgie de l’infertilité dépend de la qualité des moyens de diagnostic des maladies tubaires, des adhérences, de l’endométriose, des fibromes et autres anomalies anatomiques, de la modernité des installations chirurgicales et de la disponibilité de personnel formé à leur utilisation. (ASRM, 2014 ; ASRM, 2008f ; ASRM, ; ASRM et SRS, 2012a ; ASRM et SRS, 2012b)
La chirurgie peut être indiquée pour une obstruction tubaire, des adhérences pelviennes ou une endométriose grave lorsque la pathologie empêche clairement l’accès des spermatozoïdes à l’ovocyte ou crée une barrière au transport de l’embryon. Il n’existe pas d’essais contrôlés randomisés, mais les ECR ne sont pas nécessaires lorsque la probabilité de grossesse sans traitement est proche de zéro, comme c’est le cas dans les stades les plus graves de la maladie tubaire et de l’endométriose. La chirurgie ne permet cependant pas de rétablir un taux de grossesse normal. La gestion de l’endométriose est souvent complexe car elle peut être associée à des douleurs et à des kystes ovariens (endométriomes) ainsi qu’à l’infertilité. (Johnson, 2013) (Dunselman, 2014)
Les conditions de base pour un bon service de chirurgie de l’infertilité sont des instruments et procédures de stérilisation adéquats, des chirurgiens expérimentés, une bonne anesthésie, des capacités de monitoring continue et de bons soins postopératoires.
En cas d’obstruction des trompes, si la FIV est disponible, il s’agit de juger de la gravité de la maladie tubaire et de savoir s’il faut recommander une réparation chirurgicale des trompes (avec un potentiel de fertilité future) ou une FIV avec la nécessité éventuelle de cycles répétés et coûteux. Bien que le coût de la chirurgie tubaire soit similaire à celui d’un ou deux cycles de FIV, si la chirurgie tubaire est efficace, il peut être possible d’avoir plus d’une grossesse.
Au cours de l’évaluation de l'infertilité, des troubles endocriniens ou d’autres troubles médicaux coexistants peuvent apparaître et doivent, si possible, être traités. On peut notamment citer la diminution de la réserve ovarienne, l’obésité, l’anorexie, le diabète et les maladies thyroïdiennes. Il convient également de noter les antécédents d’exposition aux perturbateurs endocriniens dans l’environnement du patient, même si, en général, on ne peut pas faire grand-chose pour modifier l’exposition de la femme ou de l’homme.